Pendant le weekend

Carnet(s) de voyage #18

C’est certainement parce que je ne le prends pas tous les jours que ce train m’est familier : paradoxal ? peut-être, mais après le métro

le billet, le train à Saint Lazare qui s’en va tous les quarts d’heure, penser aux photos de l’ami D. auxquelles il a eu la gentillesse d’adjoindre un texte, une sorte de poésie que j’ai écrite comme une décalcomanie de ce que je voyais en consultant ses diptyques, y repenser et penser aussi à « North by Northwest » (Sir Alfred, 1959, « la Mort aux Trousses »)

l’intérieur et l’extérieur du train, le wagon restaurant, Eva Marie Saint  et Cary Grant, on rêve toujours dans un train, un peu, James Mason, c’est peut-être parce que je ne le prends pas tous les jours

c’est qu’il n’est pas bondé, que je n’ai pas de préoccupations autre que celle d’arriver à l’heure

je suis en avance, je regarde dehors, on passe au bas du square des Batignolles

juste ici, à quelques mètres s’élèvera bientôt le nouveau palais de justice, cent soixante mètres de haut dit-on

c’est un petit voyage d’un quart d’heure, on passera la Seine, la banlieue et ses pavillons, ses cités, la banlieue comme une ceinture autour de la ville qui la protégerait des animaux sauvages et des vents contraires, la capitale derrière soi, on repense parfois à cet âge qui avance

c’est que le temps avance, ai-je parcouru les deux tiers, les trois quarts, ou plus de ce chemin-là, on arrive, une gare, une autre, les humains montent et descendent, on se presse, on avance, on parle au téléphone, les photos

il ne s’agit que de se souvenir peut-être, on regarde à peine inquiet le nom de cette gare, cette commune inconnue, où est-ce déjà, le sait-on, sans doute entre la ville Lumière et le reste du monde, on avance le train continue, sonne, c’est un omnibus probablement, deux étages, comme celui du Rer C qu’on prît un jour on est en haut, le temps avance et on pense encore à ces photos, un lieu, une exposition, on verra bien sûr, on en reparlera, connaître regarder c’est un théâtre, je crois, ou alors je confonds

je marche, une pharmacie, un tabac, un billard, des autochtones, la ville, grande ville, ce sont les Hauts de Seine, neuf deux, je regarde la rue, un lieu sous la pluie, les gens, onze heures, on finit les courses

saura-t-on jamais ce que nous serons, dans vingt ans ? Le temps aura passé, et peut-être sur cette terre déjà, trop de temps je crois, un lieu comme il n’y en aura plus, la place manque,

on se gare, on referme la porte, la voiture qu’on reprendra aux vacances, on la laisse, on prend le train, le matin, on revient le soir, on attend les beaux jours, un matin, à Colombes…

 

 

 

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2 Comments

    Le Colisée à Colombes… les oiseaux célestes abolissent les frontières (mais jamais un coup de dés…), un temps j’ai fait souvent l’aller-retour vers Aulnay-sous-Bois, le RER est un métro bizarre comme démultiplié en hauteur – il n’y a pas de justice ! – mais ça fonce plus vite et on voit plus de paysage, si l’on compte bien.

    Quant aux ans qui passent, ce sont comme des stations souterraines ou en plein air : faut-il les compter avant le terminus ?

  • @ Dominique Hasselmann : non, on va les laisser avancer, les laisser avancer sans les compter et puis qu’elles s’amoncellent, ces années…