Pendant le weekend

Carnet de voyage(s) #90

 

 

On venait de la rive gauche du fleuve (comme à Paris, un peu ce fleuve qui s’ébat là vers la Manche la mer du Nord, plus loin l’Atlantique)

sur-la-route-1

on passe le pont (de Normandie, 5.40 euros), on se retrouve rive droite, on croise d’autres routes

autoroute-vers-fecamp-1

tout le monde se presse-t-il pour rejoindre quelque part, quelqu’un

champ-autoroute-croisement

c’est le soleil qui s’en va, la nuit, le chien le loup

rembarde-pont-autoroute

au loin le Havre

le-havre-du-pont

distinguer, sans lumière, croiser des autos

le-havre-du-pont-2

le soir est arrivé, un autre pont qui suit

pont-2-fecamp

(les photos du précédent sont désormais mortes et enterrées, jamais plus on n’en entendra parler, elles n’ont pas d’impression, pas de mémoire, pas d’existence, c’en est fini d’elles) à la nuit, on sera arrivé, la maison, l’envoyée des propriétaires, l’état des lieux, Bella Pochez, le nom de la petite rue en pente, morte en déportation car elle était née Weil, juive, assassinée voici soixante treize ans et on oublie à présent, la peste brune porte des habits neufs, ses propos sont retransmis par les médias et elle est invitée dans des débats pourquoi pas ? des millions de gens dans l’urne pour elle, des millions (il y a un article, là, je viens de voir ça, j’ai pensé à Gérard Mauger, des idées noires, de l’ordure, j’ai pensé à mon grand-père) il faisait noir, on allait faire quelques courses (je ne sais plus, je ne sais plus, une soupe peut-être des pâtes, une salade ? je ne sais plus, les agapes, tu sais parfois, ont un drôle de goût), le soir on allait respirer (« la plage est là, à trois cent mètres, nous avait dit cette dame, le centre ville, là-bas à six cents »), non mais on connaît, on est déjà venus, on sait à peu près, demain on ira acheter à la criée des fruits de mer, mais ce soir, les estacades

estacade-fecamp-1

le vent et mes yeux pleurent (depuis de nombreuses années, mes yeux pleurent au vent, j’ai consulté, ils pleurent toujours) (la vieillesse, peut-être, le temps qui passe, le vent ?)

estacade-fecamp-2

dans le chenal l’eau avait des teintes vertes, et comme on sait, l’important est dans la qualité des verts, il faisait un temps à aller dormir, le lendemain la même promenade, le même vent, les courses, le ciel un peu bas, un peu lourd, sans pluie sinon un vague crachin rare, nous n’avions pas froid, il faisait peut-être même doux, on allait, on marchait

petite-fille-bord-de-emr

une petite fille sur les planches admirée par des parents, peut-être

alice-gege-marie-fecamp-noel-16

nous riions, il y avait des vagues sur l’océan (c’est la mer, ici, mais c’est l’océan tout au fond du cadre)

plage-fecamp-1

est-ce l’albâtre, est-ce l’aiguille creuse

plage-fecamp-2

celle-ci a les tons plus chauds, n’importe, le soir est passé, les cadeaux, les rires, quelquefois quelque chose comme de la tristesse, le mal au ventre de l’un, à la tête de l’autre, c’était déjà presque fini, tu vois comme le temps passe, on n’attendait plus on allait partir, l’attention a été attirée par cette profusion incroyable de machines électriques dans cette maison (je n’ai pas compté, mais trois dans la buanderie, plus sept ou huit dans la cuisine qui fait salle à manger le bazar de télé plus chaîne plus internet plus le reste, environnés et ceints et cernés de toutes parts de ces appareils, ici, là, ailleurs), il y avait aux étagères de cette sorte de salon (canapé/fauteuils d’osiers/petites chaises de paille pour les enfants) des livres qui n’avaient jamais été ouverts, en pure (si on ose) décoration, parce que des livres ça fait bien sans doute, je ne sais pas ce qui a prévalu à la disposition de ces ouvrages, je me suis dit « relève les titres et les auteurs, pour voir » mais non, impossible (il y avait, si tu veux, un livre d’un animateur de télévision, plus un autre d’un spécialiste des cabarets – une photo de lui serrant Anne-Marie Carrière dans ses bras, d’autres choses encore) et l’un d’entre eux (lu, celui-là) qui donnait un peu de ceux qui vécurent là, un peu, beaucoup à la folie

maurice-leblanc

ici il s’agit de Maurice Leblanc « prisonnier d’Arsène Lupin » tout comme Conan Doyle l’était de son Sherlock Holmes, la cocaïne et le violon, le souvenir des livres de poche dans la maison, là-bas, au nord est, on repartait, vers Paris on lançait la machine (l’essence 95 à 1.39) on partait, on s’en allait, déjà c’en était fini, la prochaine fois, on ira peut-être encore ailleurs, à l’intérieur, non, au soleil, je ne sais pas, ces choses-là, parfois, me paraissent d’un tel luxe

bonde

ici on a la bonde mécanique (tourner le bouton carré dans le sens de la rotation de la terre et la bonde en arrière plan se ferme : c’est beau comme l’Iliade, l’Odyssée et Ulysse réunis), en passant dans la rue, cette façade dans les verts

solsou-freres

à la nuit, vers une espèce de village – un bourg, quelque chose virages au centre ville limitation à trente, l’avant veille, ici même, nous avions croisé une charrette qui transportait une jeune fille dans les quinze piges et un père Noël dans les soixante – il y avait cette officine qui allait, dès le lendemain, rejoindre l’invent’hair

tete-en-lhair

demain un autre jour, on ira sur le cou reposer le joug de ces travaux interminables, mais pour le moment, la route, la nuit, et la voiture qui file

Share

4 Comments

    et un regard tendre sur le monde

  • Nous vous avons succédé, quelques jours plus tard, un peu plus au nord, sur le même rivage, falaises et grand soleil glacial, quelle merveille ! Dans la maison les livres étaient tous en anglais.

  • une mélodie secrète née des souvenirs égrenés, des télescopages de temps et une douceur à baisser au moins pour un instant la garde

  • Les enseignes « vins et spiritueux » m’ont toujours paru spirituelles, même si c’était forcément involontaire…

    Belle balade… et belle nouvelle année !!!