Pendant le weekend

Il est temps

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Je ne sais pas vraiment ce qui s’est passé et je ne me souviens pas de tout. Je sais que demain, je sortirai. Je vais quitter ce repère noir, ce nid étroit et destructeur, ma grotte privée. Je m’y suis enfermé, demain je sors. Je me libère.

Je n’ai pas réussi à quitter la Francilienne. C’est étrange. Il faut que je retrouve mon chemin. Demain, je pose les bonnes questions, j’interroge, j’enquête. Je ne peux pas imaginer rester ici beaucoup plus longtemps. Je suis venu en conquérant, je ne suis pas venu m’installer.

Le type de l’hôtel est venu frapper à ma porte hier soir. Il m’a suggéré de quitter les lieux assez rapidement. Il m’a dit être inquiet et m’a précisé que sa direction supportait mal la présence d’un individu présentant divers troubles. Je ne lui ai pas répondu. Je me souviens lui avoir glissé un papier sur lequel était inscrit le numéro de ma carte bleue déjà en leur possession. Il m’a dit qu’il ne s’agissait pas seulement d’argent, que cette chambre était réservée pour d’autres clients et devait être libérée maintenant. J’ai négocié avec le type. Je lui ai glissé un nouveau papier sur lequel était indiqué une taille de chemise et à nouveau le numéro de ma carte. J’ai aussi précisé : Je pars demain.

Dans l’étrange cabine-salle d’eau, j’ai même réussi à laver quelques uns de mes vêtements. Je me suis rasé, douché, changé, transformé. J’ai aujourd’hui, un visage de communiant. J’ai trouvé une chemise blanche sur la poignée de la porte, côté couloir. Le type de l’hôtel était allé l’acheter probablement dans la  ZAC de l’Ambresis, et me l’avait gentiment déposée. Je ne pensais pas qu’il le ferait. Je ne sais pas ce que j’aurais fait à sa place. Ou plutôt si: je n’aurais sûrement rien fait. Il est vraiment aimable ce type. Peut-être peut-il m’aider à rentrer chez moi?

Les jours précédents, je ne me souviens de rien. Il faut dire que j’ai tout mis en œuvre pour n’avoir aucun souvenir. Je n’ai absolument rien fait. Il ne peut pas y avoir de souvenir. Je me suis appliqué à saboter mon projet, et c’est tout. Je n’ai rien fait d’autre. Je suis resté cloîtrer pendant tout ce temps et j’ai regardé cette idée saugrenue de festival se désagréger lentement.  Je ne m’en veux même pas. Mon frère pourrait m’en vouloir, mais pas moi. J’aimerais qu’il m’en veuille. Ça voudrait dire qu’il est là, à mes côtés. On s’engueulerait sûrement, on discuterait longuement, on finirait par ne plus comprendre la raison de notre dispute, et on repartirait de plus belle sur notre formidable projet.

Maintenant, il faut que je rentre.

Adrien Villeneuve

Faisons table rase. 

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