Pendant le weekend

Carnet de voyages #35

Chantier de la bataille

Il a fallu partir tôt (moi j’aime le matin, tôt, j’aime le métro où on n’entend pas les cris au téléphone, où on ne voit pas de poussette, où le monde est encore engourdi, les yeux sont las, les traits sont tirés, les casquettes au ras du regard, j’aime le matin tôt « le premier croissant le café noir qu’on prend près du percolateur »). On passe par la bataille, on change.

Le train, la vitesse du vent, on est déjà arrivé, il neige, on cherche le tri postal

l’une des salles du Tri Postal

Un des tissus aux milliards de perles

on arrive pour l’ouverture

Une des oeuvres de Borre Saerthe

un billet pour la journée à 7,5 euros transports compris, toutes les expositions de la ville et des villes proches aussi, une approche de l’art contemporain comme on aimerait en trouver à Paris… Des merveilles comme cette cabine d’ascenseur, un piège (ma préférée)

Leandro Erlich « Elevator Maze »

des formes revêtues de tissus magnifiquement ouvragés

Formes dues à Nick Cave

d’autres encore, comme ces néons, une musique, du passage, le monde contemporain

un extincteur

la vie est un passage, autant qu’il soit espiègle, joyeux. Et puis. Une merveille : le film vidéo d’Anton Ginzburg, « Hyperboréa » présenté à la biennale de Venise il y a deux ans

montre le bout d’un monde, des énormes navires, des ponts sur les neiges, les brouillards,  les eaux, les restes de goulags, le vent, le feu (nuage rouge, utopie), loin le froid, la nuit et le soleil, une merveille…

Mais non, nous sommes à Lille

il y fait un froid de canard, la neige nous accompagnera toute la journée, on y verra des tissus, à la piscine transformée en musée (pas de photo – le tourne à gauche en a fait.. -: on prendra le métro, resserré, bleu, on côtoiera des gens, mais le coeur n’y sera pas pourtant : parfois les choses arrivent, et tombe un bruit fracassant), la neige tombera, dans la gare Saint Sauveur, un petit film de l’eau en miroir dans une main, un visage s’y reflète puis disparaît tout à fait avec le liquide qui s’est écoulé

plus de marchandise, mais d’énormes sculptures (un diable noir ne m’a pas plu : la neige blanche sur lui avait une allure), les rues deviendront noires de nuit, un passage dans l’exposition sur les tours de Babel, au musée des Beaux Arts

un autre dans celle qui narre les contes flamands (des tableaux magnifiques de Bosch et Brueghel)

une vie entière à dessiner, représenter, comprendre et transmettre, les artistes, à présent pourtant, quelques jours plus tard, de retour à Paris, la disparition de Jean-Bertrand Pontalis, le jour de son anniversaire (comme Léo Ferré a disparu un quatorze juillet), le coeur est las, même si le soleil, même si le froid, la neige, tout cela n’a qu’un temps, il fait froid et je suis fatigué

 

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