Pendant le weekend

Carnet de voyage(s) #75

 

 

Est-ce le texte, est-ce l’image ? Il y a toujours qui tourne quelque chose comme une chanson (là, c’est « my sweet lord » par et de Georges Harrison, est-ce une sorte de pli pris dans les années soixante, qui tout à coup, indéfroissable, irréparable non plus, revient ? je ne sais), ce n’est qu’ensuite que les choses s’accordent, un diapason des humeurs, une sorte de mise à plat, quelque chose qui se passe entre le moment (ici décrit, plus ou moins) où les choses sont (ont été) et celui (ici maintenant) où on les fait découvrir.

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Plan large, vu de l’espace : gauche cadre, le site de l’usine; droite cadre le lieu du musée. La route longe sans serpenter vraiment, et traversant de bas en milieu toute l’image, une frontière, une rivière qui plus loin, à l’Orne se jette (c’est le Noireau, et la ville dont on discerne à peine le faubourg d’est, c’est Condé sur)

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Zoom avant et recadrage (il y a dans les photos satellite et celle des vues au sol quelque chose d’oiseux, une sorte de prise de pouvoir, les choses ont changé mais elles sont ici figurées comme si elles devaient ainsi demeurer, focales, diaphragme, lumières et netteté) (j’en (ab)use): la société anonyme française du Ferodo (SAFF) en son site de tissage à l’amiante des plaquettes de freins, ici présente depuis les années trente je crois (j’ai vaguement cherché il y a des choses, mais je fatigue vraiment) :; ce qui m’importe un peu ici, c’est que de cette marque (SAFF) on trouvait aussi une usine dans le banlieue de cette ville du nord picardie, Amiens (dont parle François Maspéro, dans son « Des saisons au bord de la mer ») où non loin, on trouvait aussi une usine d’un fabricant de pneumatiques (premières fiches de paye, premières obscures et/ou odieuses raisons au travail, premières illusions sur la liberté qu’il permet (foutre), premières primes de douche, premiers pas dans l’univers laborieux fermé contraint limité), Ferodo usine d’embrayage (et puis l’amiante n’est qu’un poison, on ferme, on licencie, on s’en va : l’argent sait partir où il faut)

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L’usine est à gauche a fermé après des luttes longues et ouvrières, je crois l’année dernière, l’histoire industrielle de ce site serait à faire, la limite et la frontière de l’Orne et du Calvados qui passe sur le Noireau apparemment, plus loin vers l’est, c’est ici l’objet du billet mais on s’égare aussi, n’importe on y revient

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on aura à nouveau recadré : il s’agit d’une gare (car, comme l’Employée aux Ecritures, on aime ici les trains) puis rezoomé avant

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il s’agit de Pont Erambourg en sa gare (petit bourg doté de ponts nombreux) : on distinguera si on peut (les images sont ce qu’elles sont, comme à l’accoutumée) du haut vers le bas, la frontière du Noireau (on est donc ici dans l’Orne), puis la ligne de chemin de fer (où ne passent plus désormais que des vélos-rails : on discerne pourtant quelques wagons d’un train qui paraît bouger); juste au dessous les quatre wagons (dans les blancs) postaux dont on reparle et un autre vert, le toit de tuiles rouges d’un hangar, le bordant de biais trois autres voitures et wagons, puis en bleu vert la gauche encore, la voiture d’unmétro; dans la cour stationnent des automobiles; on voit le carrefour triangulaire où j’ai, un dimanche après midi, le seize de ce mois d’août, garé mon auto, et sur la droite la gare du lieu).

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C’est en soixante dix du siècle précédent que la société nationale des chemins de fer a abandonné l’exploitation de cette ligne qui relie Flers à Caen

 

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et dans ces quatre wagons postaux, on trouvera une exposition (photos, textes, extraits, lettres, vêtements, outils, …) qui rend hommage à cette ligne, à ceux qui la faisaient vivre (les postes par exemple), on y trouvera mentionné ceci

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et d’autres choses encore, de l’histoire, des objets

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d’autres

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il y en aurait de quoi emplir un ouvrage (ici l’armoire à dépoussièrage

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il s’agit du vert postal sans doute), toute une longue série d’histoires, lieu de retrouvailles (ce dimanche-là on festoyait ici, mais nous y sommes venus trop tard) et d’une certaine qualité de mémoire afin de faire vivre ce lieu, cette voie

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garder du passé quelques souvenirs en dur (au son, Georges Harrison chante « Isn’t it a pity »)

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quelque image d’une troisième classe révolue

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et d’autres voitures qu’on peut encore croiser à Paris

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d’autres encore

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un après midi à la campagne, l’industrie qui se meurt ou qui change de lieu, qui évacue et licencie (à tour de bras : lire ici peut-être : évidemment « communicante » histoire d’une marque qui doit être édifiante et positive comme on sait bien les retartiner de nos jours), amiante, ouvrier, voie de chemin de fer, vélos et trente six, les luttes, les guerres et les batailles, les postes et les chemins de fer : prendre ces institutions en symptôme, signes, repères et témoins de la vie moderne, d’aujourd’hui et voir le chemin parcouru, comme le gâchis qui en résulte) une promenade dimanche après-midi

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le long d’un petit chemin en file indienne de petits cailloux

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avancer, rejoindre ici un pont, des rires, des bouteilles et des assiettes en carton

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rien d’autre qu’une époque sinistrée (cette manie de doubler les photos), une campagne bucolique qui mérite certainement mieux que cette industrie empoisonnante, quelque part vers cinq ou six heures du soir, et le long des voies, près du mur de la gare qui ne sert plus, ces quelques petits joyaux

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4 Comments

    et pertinence de Georges Harrison

  • Et pour qui Harrison le glas ?

    Ces wagons abandonnés m’ont fait un peu penser à celui qui est « rescapé » des camps (les conducteurs de la SNCF firent leur job à part quelques résistants) à Drancy – figure de Max Jacob.

  • J’ajoute donc ce codicille à ta belle excursion ou incursion…

  • @Dominique Hasselmann : (tu es en grande forme dis donc) merci en tout cas (et à bientôt pour le Vazco)