Pendant le weekend

Oublier Paris #104 (24/12/2021 – Vendredi 2023)

 

 

 

je ne suis qu’un pauvre misérable et le resterai donc encore – hier soir je marche rue des Alouettes, j’avise le marchand de journaux au bout de ma perspective non loin – il est cinq heures et demie sans doute plus – il fait nuit – les jours rallongent m’a-t-on dit (peut-être) mais ce n’est pas perceptible – je maudis le plan de l’écliptique –

j’avance car le jeudi paraît le spécial du canard des livres – ça ne présage rien de bon, c’est le moment festif (disait le boucher tout à l’heure – une canette à 26 euros pour ce soir) l’année se termine, on ne fait pas de cadeau – j’avance

c’est posé au dessus de ce bazar jaune – est-ce oublié ? je ne sais pas dire

en tout cas je le vois, rouge, rebondi dans l’ombre presque usagé peut-être – je ne crois pas que mon cœur batte spécialement plus fort, je n’ai pas spécialement non plus compris à ce moment – un tour un sort le fatum la conjonction des astres – il fait nuit et les images ne rendent pas compte de l’ambiance assez infectieuse du moment, le populaire se hâte à ses emplettes, il fait nettement moins froid que tout à l’heure – lui est posé sur le dessus de la boite (cette boîte-là, celle-là même)

je le regarde, je le toise, rebondi là – c’est lui

je passe, je vais acheter le canard je reviens – plié sous le bras le canard et son supplément : en première page, un signe : l’immonde qui dit bonjour avec son poing… fuck off – je reviens sur mes pas il est toujours là, posé sur sa boite jaune : il me défie – et évidemment que je le prends puisqu’il m’a attendu – je l’emporte, je l’ouvre plus loin (une odeur de parfum, lointaine) (là, oui me dis-je sûrement, oui : des dizaines et des dizaines de billets verts) (non, pauvre je suis misérable je resterai) : des pièces, certes, des cartes (bleue dorée premier d’identité vitale verte icom comme s’il en pleuvait, premium certes, indigo j’en sais rien, des cartes de visite aussi bien)  (zéro photo sinon celle sur la carte d’identité – naissance le même jour que le sanaryote) – pfff – j’aurais mieux fait de le flanquer à la boîte, il devait y être et puisqu’il y était, telle était sa destination – non je compose le zéro six de la carte de visite, voilà une Françoise apparemment : « il y avait beaucoup d’argent, dit ensuite la voix » ah fais-je, « oui cinq cents euros c’est beaucoup pour moi…  » et pour moi donc… « toute la journée au commissariat… non demain je dois passer prendre des choses… oui dix heures oui, oh merci merci…  » – bah ça ne fait que cinq coupures vertes, après tout – et c’est quoi, au fond, cinq coupures vertes tu peux me dire ? – rien – foutre demain, il fera jour certainement

évidemment, la question ne se pose pas sauf que si : qu’aurais-je fait si ouvrant l’un des trois fermetures Éclair j’avais découvert ces cinq billets verts ? (ou dix oranges ou vingt-cinq bleus etc.) ?

On s’est souvenu (on l’a envisagé avant hier) du film de Farhadi « Un héros » : l’argument en est la découverte d’un sac contenant dix sept pièces d’or à 4300 tomans l’une (le type a une dette de 150 000 tomans, les 17 pièces en représentent la moitié) (j’ai le sentiment en regardant les taux de change qu’une pièce vaut mille euros) (ça me paraît beaucoup) – non, mais non : sans doute aurais-je appelé de la même manière sans pour autant en devenir un « héros » – bah qui peut savoir ? en tout cas, au Sarah Bernhardt, quand paraîtra ce billet, je tendrai le petit objet rouge et rebondi à sa propriétaire

Un conte de Noël ? Je laisse le dernier mot à mon ami Lulu deuch’Nord

Avec mon meilleur souvenir.
Joyeuses fêtes (bon réveillon) !

 

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4 Comments

    ça fait beaucoup pour plein de gens (bon une fois dépensé on réalise que ça fait pas tant que ça) – moi j’en reste à une partie des traditions du midi, assez économe, la campagne n’était pas si riche, la soupe d’ail (normalement c’est le lendemain moi je prends avant) et la morue comme d’habitude, manquent les cardes parce que je n’y ai pas droit et comme suis pas sage je remplace les treize desserts assez économes à vrai dire, c’est la quantité qui fait le luxe et puis les fruits qu’on a confit ou achetés ainsi, par de vrais bons chocolats – mais je prends des couverts d’argent.
    Une fois de plus Lucien a les mots justes

  • @brigitte celerier : je suppose que le manteau qu’elle portait (une femme charmante, exactement dans le même état d’esprit qu’était mon amie TNPPI dans les années quatre-vingt) (de visage, elle ressemblait, surtout dans ses sourires, à Nicole Garcia) les valait sept ou huit fois (je ne parle pas des bijoux, hein d’accord, je ne les ai pas calculés) – malheureusement j’avais laissé le nino à la maison – sans pax le garçon (assez fâché, revêche on le dérangeait, il était seul dans son immense bar, nous étions ses seuls clients) n’a pas voulu servir – elle est partie vers son destin (lorsque je lui ai rendu la pochette, elle l’a accueillie d’un « oh c’est merveilleux ! ») regagnant sa rive… ah oui, attends, elle m’a donné une boite de chocolat Larnicol pour marquer le coup – c’est mignon – trop gentille – j’aurais préféré Debauve (là c’eut été carrément TNPPI) mais on fait ce qu’on peut…)

  • Joli conte de Noël : joyeuse fête par conséquent et de manière supplémentaire ! 🙂

  • @Dominique Hasselmann : qu’elle vous soit, à toi et à tes proches, tout aussi joyeuse, ami Chasse-Clou – j’en profite pour la souhaiter ainsi aux lecteurzétrices de passage